Luc Rozentvaig, le doyen qui défie les juniors

Si les excellents débuts en Alpine Elf Europa Cup des jeunes pilotes comme Lilou Wadoux (Patrick Roger - Autosport GP) prouvent que la valeurn'attend pas le nombre des années, il en est un sur qui l'âge n'a pas de prise : Luc Rozentvaig. Pilote de course depuis plus d'un demi-siècle, ce gentleman driver de... 79 ans découvre cette compétition. Et il entend bien améliorer sa 14ème place au classement général !

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"L'Alpine A 110 Cup est une voiture extraordinaire, agile, qui freine très tard. Elle réalise des temps qui ne seraient pas ridicules en GT, loin de là ! Le problème, c'est que je ne sais pas la conduire pour l'instant. Ou plutôt la piloter" explique humble mais déterminé Luc Rozentvaig, le plus âgé - et de loin - des pilotes de la quatrième saison de l'Alpine Elf Europa Cup. "Il faut additionner les âges des quatre plus jeunes pilotes pour obtenir le mien" calcule malicieusement celui qui fait ses débuts en Alpine Elf Europa Cup. Les plus jeunes, eux, trustent le haut du classement général, à commencer par un autre néophyte : le leader, le Belge Ugo de Wilde (Herrero Racing). Ainsi que la Picarde aux couleurs de Patrick Roger - Autosport GP Lilou Wadoux, 3ème après les deux courses d'ouverture à Nogaro, le Toulousain Louis Méric (Méric Compétition) 4ème ou encore le Corse tenant du titre Jean-Baptiste Mela (Autosport GP). Tous les quatre ont seulement entre 18 et 22 ans !

"Un extraterrestre" pour les médecins...

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"Je ne sais pas jusqu'où je vais aller par rapport à ces p'tits jeunes" poursuit le pilote de la N°2. "Ils ont un niveau d'enfer, mais j'espère bien me bonifier". Se bonifier avec l'âge comme le (bon) vin dont Luc Rozentvaig dit n'avoir "jamais bu un verre ! Je n'ai jamais touché non plus une cigarette.. Les médecins me disent que je suis un phénomène à mon âge, un extra-terrestre ! J'ai aussi la chance d'avoir 15 dixièmes à un oeil et 12 à l'autre", des capacités peu communes vu son âge et très précieuses en sport auto où l'acuité visuelle est évidemment essentielle.


Admiratif des jeunes pilotes très rapides

Alors quel... regard Luc Rozentvaig porte-t-il sur l'Alpine Elf Europa Cup qu'il découvre cette saison ? "J'adore son organisation et je dis ça sans flatterie ! C'est sérieux sans se prendre au sérieux et le niveau d'ensemble est extraordinaire. J'admire ces tous jeunes pilotes qui vont vite, vite, vite ! Lilou Wadoux, qui a l'âge de ma petite-fille, démontre que les femmes peuvent aller très très vite. Je ne suis pas jaloux mais à moi de faire mieux" explique l'ancien kiné vertébrothérapeute qui, il y a déjà plusieurs décennies, a revendu son cabinet "pour assouvir ma passion" du sport auto. "Sans être vantard, j'étais rapide, j'étais toujours en tête des essais, des qualifs, en Coupe Renault Elf puis en Porsche Cup, où j'ai fait plein de belles choses. Mais au début je n'avais pas la technique, alors je ne finissais pas les courses", ce qui n'empêchera pas Luc Rozentvaig de disputer la Porsche Cup... vingt-et-un ans de suite, en côtoyant notamment Jean-Pierre Jarier, Dominique Dupuy et Christophe Bouchut, au début des années 1990.

"Je ne suis pas encore bon"

Du coup, celui qui n'a pas été habitué à se traîner en queue de peloton a bien l'intention de progresser au volant de son Alpine. "Je n'ai pas encore toutes les sensations, notamment pour le freinage qui est extraordinaire ! On peut freiner très fort, elle ne bouge pas. A Nogaro, j'ai un peu amélioré mes temps au fil du week-end, mais je ne suis pas encore bon" lâche-t-il, comme pour prévenir que l'on n'a pas encore vu le vrai Luc Rozentvaig...

"J'ai une chance merveilleuse à mon âge, les médecins disent que mes analyses sont anormales ! J'ai aussi une femme extraordinaire que j'adore depuis quarante-huit ans ! Elle me fait des repas très sains. Et je dors très tôt, je me lève aussi très tôt" raconte l'inoxydable Luc Rozentvaig, fort d'un organisme "qui fabrique beaucoup d'antioxydants" peut-être grâce au poisson, qu'il mange très souvent, notamment son préféré : le saumon fumé de chez Pétrossian, épicerie fine parisienne centenaire.

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Du judo aux stages de pilotage en passant par la boxe

Pourtant ce titi parisien, né sous l'Occupation à Pierrefitte-sur-Seine, a eu "une enfance très difficile, dans une famille un peu spéciale, je n'ai pas eu de mère, j'étais livré à moi-même. Et c'est le sport qui m'a fait tourner du bon côté..." Les sports de combat pour commencer. Car le vétéran des gentlemen de l'Alpine Elf Europa Cup a eu plusieurs licences.. Il commence par "le judo puis un peu de karaté mais le karaté ne me plaisait pas comme on ne portait pas les coups. Ensuite j'ai découvert l'aïkido, qui est fabuleux ! Un peu de boxe aussi, j'ai eu le nez cassé trois fois (rires) !" détaille celui qui apprécie les sports de combat, "où l'esprit est très bon, avec les valeurs du collectif, très importantes", mais aussi et surtout le sport automobile. "J'ai une écurie avec cinq voitures de course, dont cette très belle Alpine A 110 Cup, mais aussi une Ligier JS2 R, une 308 Racing Cup et deux Mitjet. Et on organise des stages de pilotage, des journées entreprises aussi. J'entraîne une douzaine de personnes, dont quelques grands patrons français".

Chez lui à Magny-Cours, avec son "petit frère" mécano

Au fait, l'écurie de Luc Rozentvaig est implantée à Magny-Cours. Sur le circuit de la Nièvre où est justement prévu le prochain meeting de l'Alpine Elf Europa Cup, du 7 au 9 mai.. De quoi le motiver encore davantage pour progresser au classement des gentlemen, dont il occupe la 4ème place sur 8, ex-aequo avec Pierre Macchi (Patrick Roger - Autosport GP), Stéphane Proux et Franc Rouxel (Herrero Racing tous les deux), mais surtout au classement scratch, où Luc Rozentvaig pointe en 14ème position sur 18. "Je dois bien ça à mon sponsor, Pascal Traquet (NDLR : ancien pilote, notamment en Porsche Cup). C'est lui qui a acheté mon A 110 Cup. J'aime bien recevoir mais j'aime aussi beaucoup donner, alors à Magny-Cours je n'aurai pas envie de me traîner comme à Nogaro (sic)" glisse celui qui s'est classé 14ème des deux premières courses de la saison. Et Luc Rozentvaig confie avoir "besoin d'aimer, d'avoir des atomes crochus et d'affectif pour fonctionner. C'est ce que je trouve avec mon mécano, Jérôme Cudennec, qui a 40 ans et que je considère comme mon petit frère. On a commencé ensemble, il avait 19 ans". C'était il y a plus de vingt ans, c'était hier pour Luc Rozentvaig...

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Reportage, photos et textes Léandre Leber et Vincent Delorme Vas y Mojo pour Autosport GP

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